Le poids de la tête

Il est important de prendre conscience du poids de notre tête. Si notre tête n’est pas bien installée au-dessus de notre corps, elle ne permet pas d’être juste par rapport à l’ensemble. Mais je pourrais dire cela pour tout le reste et surtout pour les grandes zones : bassin, cage-thoracique, tête.

La tête se pose sur la colonne. Tout mouvement de la colonne se répercute sur la position de la tête ou je devrais dire : devrait se répercuter sur la position de la tête si nous n’avons pas mis de barrière, de tensions qui empêchent sa mobilité. La première vertèbre cervicale, l’atlas, est formée d’un corps vertébral très mince, sur lequel la tête vient se poser autour du trou occipital. La deuxième, l’axis, possède une apophyse verticale qui permet le pivotement de l’atlas et les mouvements de rotation de la tête. Son apophyse rentre dans le crâne par le trou occipital. Ce trou occipital est sous le crâne au milieu. Quand je vois certaines personnes la tête en avant du corps, c’est qu’elles ont une perception de l’assise de la tête sur la colonne en arrière, comme si le trou était à l’arrière du crâne. Certaines ont voulu étirer leur cou en faisant le double menton. Elles n’ont allongé que l’arrière, alors que si nous voulons allonger le cou, il est important de le faire devant (sous le menton), à l’arrière, et sur les côtés, en travaillant les trapèzes supérieurs entre la base des oreilles et les épaules. Nous sentons le dessus du crâne qui s’élève. Nous pouvons toucher notre atlas qui se trouve latéralement à peu près sous le lobe des oreilles. Si nos oreilles sont au-dessus de nos épaules, le visage est en avant des épaules et la partie du crâne qui se trouve derrière les oreilles est en arrière des épaules. Cette perception est très importante.

La tête est lourde, si nous la plaçons trop en avant ou trop en arrière (le menton levé), tout le reste de la colonne va s’adapter pour compenser cette déviation.

Nous apprendrons tout d’abord à lâcher notre tête, à prendre conscience de son poids pour ensuite la replacer convenablement. C’est vraiment une sensation très agréable quand on a trouvé la vraie place de notre tête sur le reste du corps, elle est libre, légère et nous nous sentons reliés. La courbe des vertèbres cervicales correspond à celle des vertèbres lombaires. Elles sont en creux, alors que les vertèbres dorsales (celles sur lesquelles viennent se fixer les côtes) sont en arrondi. Si la tête part trop en avant, le haut du corps sera trop arrondi en arrière par rapport à l’axe afin de rétablir l’équilibre. C’est pourquoi je demande toujours aux élèves d’être attentifs à tout leur corps à tout moment. On ne peut pas dire : « mais je muscle mon cou ou, je travaille ma cambrure ». Si je travaille ma cambrure lombaire sans percevoir que pour compenser, je cambre encore plus mes vertèbres cervicales, l’exercice est inutile. Je déplace le problème, je ne le résous pas. Il en est de même si je cherche à creuser le haut du dos pour me redresser, mais qu’en même temps je cambre encore plus le bas de mon dos. Soyons attentifs à l’ensemble de nous-mêmes. Nous ne sommes pas des objets rattachés les uns aux autres que l’on manipule indépendamment. Tout est relié, en interférence, prenons en conscience.

Les personnes ayant un handicap dans une jambe, regardent souvent par terre en se déplaçant. C’est très compréhensible car elles craignent de tomber, ce qui leur est fréquent. Je vais leur faire découvrir le poids de leur tête. Si celle-ci est en avant, elles ne peuvent pas être en équilibre, leur bassin est en arrière, leur dos cambré. Je leur apprends tout d’abord à faire confiance au sol, à s’en servir comme un partenaire et non un ennemi (ceci est valable pour nous tous, mais c’est moins vitale). Elles vont apprendre à tomber, en lâchant la tête en premier…, mais surtout en ne se crispant pas, en fondant pour atterrir détendues et non crispées. Quand elles ont bien assimilé cela, en ayant chuté plusieurs fois sans se faire mal, elles peuvent oser « relever la tête ». Nous voyons à nouveau que cette expression peut être prise au sens propre ou figuré, et que dans ce dernier cas, elle changera la vision de leur vie et de leur place dans la société. Une fois la tête redressée, le bassin et la cage thoracique reprendront leur place l’un au-dessus de l’autre.

Comment relions-nous nos jambes à notre centre. Je reprendrai l’exemple avec ces personnes qui ont un handicap car vous constaterez qu’il ne leur est pas possible de mobiliser leur jambe malade si elles ne le font pas avec leur centre.

Travail avec le centre

Dans les cours, chacun travaille pour soi, mais nous sommes ensemble et c’est grâce à la présence des autres qui sont également en recherche, que nous sommes soutenus, aidés. Il se crée dans les cours, un respect pour l’autre et même beaucoup plus, une acceptation. Chacun est reçu, accueilli. Une véritable convivialité s’installe. Elle n’est pas superficielle, recherchée. Elle est là, car nous rencontrons l’autre dans son être profond. J’ai pu souvent le constater : des personnes qui n’auraient rien eu à partager par ailleurs, ou se seraient peut-être même accrochées, vivaient de vrais moments de vie. En effet, si nous rencontrons quelqu’un au plan intellectuel, les idées se heurtent, se confrontent, ou s’accordent. Si nous le rencontrons au niveau affectif ou émotionnel, nous allons être attirés, « en phase », ou éloignés, indifférents, agressifs, dans le jugement…

Ceci n’est pas une théorie, je parle de ce qui est vécu par un travail corporel con «centre» é. Nous ne cherchons pas à théoriser, mais nous vivons une expérience que nous allons ensuite analyser. Je guide physiquement et non par de grandes idées philosophiques.

Pour être dans notre centre, nous détendons nos épaules, nos bras sont reliés à notre dos, notre tête est bien dans le prolongement de notre colonne (ni rentrée, ni le menton levé), notre colonne est libre, chaque articulation entre les vertèbres peut jouer, nos genoux, nos chevilles, nos hanches ne sont pas verrouillées (raidis). Nous ne gonflons pas la poitrine et nous ne sommes pas refermés sur nous-mêmes.

Il est important de bien installer la structure : bassin-thorax-tête, et de rattacher les membres à cette structure. Si nous sommes justes au niveau tonique, c’est-à-dire sans tension, mais avec une juste tonicité des muscles nécessaires au mouvement, toutes nos articulations seront fluides, disponibles pour l’action.

Notre attention est descendue dans notre ventre.

Nous ne cherchons pas à faire quelque-chose, nous sommes là, présents à ce qui va se passer. Même si nous avons déjà pratiqué la proposition qui est faite, nous n’allons pas rechercher ce que nous avons vécu la dernière fois, sinon nous serons à nouveau dans le passé et non dans le présent. Nous imposerons notre désir (de retrouver quelque-chose de « chouette », que nous avons vécue, mais qui n’existe plus), nous ne serons donc pas attentifs à ce que nous sommes en train de vivre.

Si les hanches ne sont pas libres, nous ne pouvons pas être dans notre centre. Le bas de notre colonne est bloqué, il n’y a plus de lien entre ce qui se passe en haut et ce qui se passe en bas.

Je me suis aperçue que certaines personnes « verrouillaient » leurs genoux dans l’idée de « tendre » les jambes. Pour cela, elles vont au-delà de l’allongement normal de la jambe, ce qui bloque la jambe en hyper-extension. Nous constaterons que cette position immobilise l’articulation de la jambe avec le bassin et qu’en répercussion, le bassin est bloqué. Elles n’auront plus aucune possibilité de mouvements de la colonne lombaire.

Dans certains de mes cours, j’ai des personnes handicapées suite à un AVC ou autre accident de la vie. J’aime beaucoup leurs présences. Elles m’obligent à être vraiment présente dans mes propositions : je ne peux pas me permettre de proposer « de beaux exercices ». J’essaie de ressentir de l’intérieur leur problématique et de trouver par quel chemin, je vais pouvoir les aider. Tout d’abord, bien sûr, prendre conscience : il est très difficile pour quelqu’un ayant une partie de son corps qui ne répond plus à la commande de mettre toute son attention à cet endroit. Ce n’est pas uniquement physique. Psychologiquement, il est peut-être plus facile de l’ignorer, ce que je leur déconseille.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *